Chaque année, pour les personnes mal-logées et sans-abri, l’arrivée du printemps est synonyme d’expulsions locatives de locataires en situation de fragilité et de remises à la rue de personnes qui ont été hébergées temporairement durant l’hiver. Autant de drames qui résultent de politiques publiques insuffisamment protectrices, et inadaptées aux besoins des personnes les plus démunies dans notre pays. Au-delà de cette répétition sinistre de drames humains année après année, les associations craignent de voir survenir pour ce printemps une réelle crise humanitaire.
Depuis juin 2017, le gouvernement affiche la volonté de mettre en œuvre une politique du « Logement d’abord », qui doit permettre l’accès effectif à un logement de droit commun de toutes les personnes qui en sont dépourvues et éviter, par des mesures plus préventives, que de nouvelles personnes ne basculent dans des situations de mal-logement ; et cela, en toutes saisons. Mais cette année encore, le printemps sera rythmé par les remises à la rue des personnes hébergées pour l’hiver et le retour des expulsions locatives, des expulsions de terrain et de bidonvilles, sans solution de relogement pour les enfants, les femmes et les hommes concernés. Cette triste réalité constitue une profonde violence pour les personnes concernées. Elle met aussi à mal l’efficacité de l’accompagnement des associations et des travailleurs sociaux, qui faute de pouvoir s’inscrire dans la durée, ne peut offrir de nouvelles perspectives aux personnes accompagnées.
Sur le front des expulsions, le fonds d’indemnisation des bailleurs, qui permet aux Préfets de sursoir à l’expulsion pour éviter de nouvelles catastrophes sociales, est passé de 78,4 millions d’euros en 2005 à 24,4 millions en 2017. Il ne permet pas de mettre en place le moratoire sur les expulsions locatives avec dédommagement des propriétaires, que le Collectif appelle de ses vœux pour constituer la première étape de la mise en œuvre d’une politique de prévention digne de ce nom sur tout le territoire. Au final les expulsions locatives ont atteint un nouveau triste record en 2017 avec 15 547 ménages expulsées avec le concours de la force publique, soit une augmentation de 46% en 10 ans ! Sur le front de l’accès au logement, le choc de l’offre promis par le Gouvernement pour faire baisser les prix ne se produit pas. Et les conséquences des coupes budgétaires de l’Etat sur le logement social se font déjà sentir. Moins de 109 000 logements sociaux ont été financés en 2018, alors que la demande ne cesse d’augmenter : plus de 2 millions de demandes de logement social étaient actives fin 2017 (soit 100 000 demandeurs supplémentaires par rapport à l’année précédente). De même, les coupes budgétaires sur les Aides personnelles au logement (baisse de 5 euros par mois, gel en 2018, désindexation en 2019 et 2020…) fragilisent encore davantage les ménages locataires à faibles ressources qui pour certains, ne peuvent plus se maintenir dans leur logement ni trouver des solutions de relogement en cas d’expulsion annoncées et pour d’autres, aujourd’hui sans logement, ne parviennent pas à trouver une offre adaptée à leurs ressources.
Enfin, la fermeture des centres d’hébergement ouverts cet hiver représente un risque de suppression d’au moins 8 000 places d’accueil, c’est-à-dire des remises à la rue massives de personnes en situation de grande exclusion, et la multiplication de campements indignes dans les grandes villes. Les associations de solidarité demandent au gouvernement et aux collectivités locales de maintenir ouvertes toute l’année les places d’hébergement proposant des conditions de vie dignes avec un accompagnement social. Aucune personne ne doit être remise à la rue au printemps sans solution d’hébergement ou de relogement.
Sans un changement majeur d’orientation en matière de politique du logement et de l’hébergement, les associations d’aide aux personnes sans abri et mal-logées craignent un printemps noir pour les personnes menacées d’expulsion ou dépourvues de solutions d’hébergement et de logement.
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